- RaumaNo
Finlande, hiver 1 : bilan météorologique
10 avril 2019, mon pot de départ pour la Finlande. Je retrouve une dizaine d’amis pour un dernier verre sur une terrasse d’un bar underground à Paris pour lequel nous avons fait 45mn de queue pour être assis sur des chaises d’écolier désaffectées et boire des pintes à 9€ (un aspect de Paris que je quitte sans regret). Mes supers potes m’ont préparé des cadeaux pour mon départ : tous les accessoires qu’il faut pour affronter le froid polaire. Ils pensent que je pars vivre en Laponie, mais je vais découvrir en arrivant que le sud du pays est bien différent.
J’ai eu la bonne idée d’arriver mi-avril, et profiter d’un climat certes frais, mais presque toujours ensoleillé, jusqu’au 1er septembre, où, tel Kad Merad arrivant dans le Pas-de-Calais, des cataractes de flottes nous sont tombés dessus. L’été indien est une saison qui n’existe que dans le nord de l’Amérique. Dans le sud-ouest de la Finlande, il ne fait déjà plus que 10 petits degrés dès la mi-septembre et les bottes Aigle sont vite rentabilisées. Début octobre, nous filons à Turku pour une séance shopping dans les boutiques de vêtement outdoor. Surprise, nous sommes les premiers clients, la collection hiver n’arrivera pas avant le mois de novembre. C’est à cette même période que des petits piquets réfléchissants sont installés sur le bord des routes, vous savez, les mêmes que sur les pistes de ski ou les routes de montagne. Fin octobre, un épais tapis de 10 cm de neige recouvre Rauma et sa région. Je savais que l’hiver serait rude, mais pas qu’il commencerait aussi tôt. Fausse alerte, les Finlandais ont eux-mêmes été pris de court : cet épisode neigeux a fait la une de la presse locale et des dizaines de voiture ont fini dans le fossé, les pneus neiges n’avaient pas encore été installés.

On m’avait dit qu’à Rauma, la grande attraction, c’est de marcher sur la mer l’hiver. J’attends toujours. La neige n’est jamais vraiment arrivée, les luges n’ont jamais servies, les pistes de ski de fond sont restées des pistes de running et les patinoires des flaques d’eau. L’hiver était un peu comme un hiver totalement pourri en France, avec 10 degrés de moins. C’est-à-dire que ma parka de ski française est devenue mon manteau mi-saison et j’ai porté mon manteau en laine jusqu’à fin mai. Au plus froid de l’hiver, le thermomètre affichait de temps en temps -7, et comme disent mes amis québécois : « bien équipé, c’est tout à fait gérable ». Il suffit de sacrifier un peu son look pour être à l’aise. J’ai donc investi dans une parka grand froid et des bottes de neige (qui ne l’ont jamais vu) qui ne m’ont pas quittées entre novembre et mars. Clairement, ça se voit à 20 000 lieues que je ne suis pas du coin. Quelle que soit la météo, les ados ici restent en Stan Smith, chevilles à l’air et jeans à trou, avec souvent plus de trous que de jeans. Les enfants eux, sont plus dociles avec l’équipement. Autant à Paris c’était totalement impossible de mettre des gants ou un bonnet à Ysée, autant là elle les réclame jusqu’à fin mai, pour aller avec sa combinaison de ski fine mi-saison, de toute beauté. Un concept moche, mais super pratique à importer en France.

Clairement le pire n’est pas le froid, mais le manque de lumière. Vers Noël, le soleil (les rares jours où les nuages lui laissent un peu de place) se lève à 10h et se couche à 15h. La ville reste très sombre car d’habitude, la lumière des lampadaires se reflète sur la neige, mais comme il n’y en avait pas, sur le goudron humide, ça marche moins bien. Le seul truc un peu amusant avec le noir, c’est la créativité des gens pour rester bien visible. Chacun accroche un bidule réfléchissant à son manteau, parait-il que ce serait obligatoire. Un dinosaure, un Moomin, un cœur… certains portent carrément des gants, des manteaux, des sacs à dos en tissu totalement réfléchissant. Même les chiens ont des colliers lumineux.

Moi, sur mon vélo, je ressemblais à un sapin de Noël avec mon gilet jaune, mes lumières clignotantes, mes rayons de vélo réfléchissants. Dommage qu’il n’y ait jamais la foule dans les rues de Rauma sinon on se serait cru dans une rave party des années 2000.

Petit à petit, la lumière revient vers le mois de février, il arrête enfin de pleuvoir et le soleil brille non stop jusqu’à septembre. Et quand je dis non stop, je pèse mes mots. J’ai pu m’apercevoir grâce à mes charmantes filles que le ciel n’est jamais noir en juin, tout juste bleu marine avec un liseré orange à l’horizon. C’est un kif que vous ne pouvez même pas imaginer après ces mois si longs et si sombres, mais quelle galère pour coucher les enfants, ou pour les empêcher de se lever à 4 heures du matin (« Maman, debout, il ne fait plus nuit !»). Le « va te coucher, il est tard, il fait déjà nuit » est un argument qui fonctionne assez peu en Finlande.
Nous sommes en juin, les cafés ont rouverts, le muguet fleuri, on commence à sortir sans pull et je peux vous dire qu’on en profite tous au maximum ici, car dans 3 mois, rebelote…Et espérons que l’hiver prochain je puisse utiliser tous les cadeaux de mon pot de départ.